Le bombardement de Guernica : la tragédie basque de la guerre civile espagnole
Le 26 avril 1937, en pleine guerre civile espagnole, la ville basque de Guernica (Gernika en basque), berceau spirituel du peuple basque et symbole de la démocratie locale, fut brutalement anéantie par un bombardement aérien sans précédent. Ce massacre, est un tromatisme dans l’histoire du pays basque, il est orchestré par les forces franquistes avec l’appui de l’aviation nazie allemande et fasciste italienne, marque un tournant dans l’histoire de la guerre moderne, où les civils deviennent des cibles délibérées. Ce drame restera gravé dans les mémoires comme une attaque directe contre l’identité basque et un avertissement cruel envoyé à tous les peuples en lutte contre les totalitarismes.
Un contexte explosif : la guerre civile espagnole et le Pays basque
La guerre civile espagnole (1936-1939) oppose les républicains, défenseurs de la Seconde République, à une coalition nationaliste dirigée par le général Francisco Franco, qui souhaite imposer un régime autoritaire, conservateur et centralisateur. Le Pays basque, profondément attaché à ses libertés historiques, son identité linguistique et culturelle, et ses institutions autonomes, se range largement du côté républicain.
En octobre 1936, le gouvernement républicain accorde l’autonomie au Pays basque, et le gouvernement autonome d’Euskadi est formé sous la direction de José Antonio Aguirre, président du Parti nationaliste basque (PNV). La capitale est fixée à Bilbao, et les troupes basques, les gudaris, participent activement à la défense de la région contre l’avancée franquiste. Ce choix politique scelle le sort de la province : pour Franco, la rébellion basque doit être écrasée. En savoir plus sur Gernika depuis les liens si dessous.
- Le site de Wikipédia : https://fr.wikipedia.org/
- Le site Basque : https://gernikainfo.eus/fr/

Guernica, symbole de la démocratie basque
Avant même le bombardement, Guernica n’est pas une ville ordinaire. C’est là que se tient traditionnellement le chêne de Guernica, arbre sous lequel les rois d’Espagne juraient de respecter les fueros, les lois et privilèges des provinces basques. En tant que symbole de la souveraineté basque, Guernica représente bien plus qu’un simple objectif militaire : elle incarne l’esprit d’un peuple libre.
En avril 1937, la ville ne compte qu’environ 6 000 habitants, mais elle accueille également des réfugiés fuyant les combats, et le lundi est jour de marché, attirant des centaines de personnes supplémentaires. C’est ce jour-là, précisément, que le destin de Guernica bascule.
Le massacre du 26 avril 1937
Vers 16 h 30, sans avertissement, une première vague d’avions allemands de la Légion Condor (unité d’élite de la Luftwaffe) surgit dans le ciel. Bientôt, une succession de vagues de bombardement s’abat sur la ville durant plus de trois heures. Des bombes explosives sont larguées pour détruire les bâtiments, suivies par des bombes incendiaires pour provoquer un gigantesque brasier. Les mitrailleuses des chasseurs allemands s’attaquent même aux civils tentant de fuir sur les routes.
Au terme de l’attaque, Guernica est presque entièrement détruite. Plus de 70 % des bâtiments sont réduits en cendres. Le bilan humain reste incertain : les chiffres officiels font état d’environ 150 à 300 morts, mais certains historiens évoquent jusqu’à 1 600 victimes, selon les sources basques contemporaines. Ce qui est sûr, c’est que la quasi-totalité des victimes sont des civils, et que l’attaque n’avait aucune justification militaire sérieuse : Guernica ne contenait ni garnison ni arsenal.
La propagande franquiste et le déni
Face à l’émotion internationale suscitée par le massacre, les franquistes cherchent d’abord à nier leur responsabilité, puis à accuser les républicains d’avoir eux-mêmes incendié la ville dans une stratégie de la terre brûlée. Mais les témoignages oculaires, les photos, et surtout les articles de journalistes étrangers présents dans la région contredisent cette version.
Le correspondant britannique George Steer, du Times de Londres, publie un rapport accablant qui fait le tour du monde. Il décrit le bombardement minutieux, les bombes allemandes, les victimes civiles. Son article est déterminant dans la prise de conscience internationale et inspire notamment Pablo Picasso dans la création de son célèbre tableau « Guernica », une œuvre dénonçant l’horreur de la guerre et devenue emblématique du XXe siècle.
Une stratégie de terreur délibérée
Le bombardement de Guernica n’est pas une bavure militaire, mais bien un acte de guerre psychologique. L’objectif est de briser la résistance morale des Basques, semer la terreur dans la population, et tester l’efficacité de la guerre aérienne sur des cibles civiles. Pour la Légion Condor, Guernica est un laboratoire grandeur nature avant les conflits à venir, comme la Seconde Guerre mondiale. Pour Franco, c’est un avertissement sanglant à toutes les régions républicaines : la soumission ou la destruction.
Un peuple blessé mais pas brisé
Malgré la douleur et la destruction, le peuple basque ne renonce pas immédiatement. La ville de Bilbao résiste encore plusieurs semaines avant de tomber aux mains des nationalistes en juin 1937. Mais la mémoire du bombardement de Guernica reste vivace, transmise de génération en génération comme symbole de la brutalité franquiste et du sacrifice du peuple basque.
Sous la dictature de Franco (1939-1975), il est interdit de parler de Guernica, encore moins de commémorer l’événement. Le tableau de Picasso, exposé à New York puis au Musée Reina Sofía à Madrid, ne peut revenir en Espagne que après la mort du dictateur, comme un symbole du retour de la démocratie.
Guernica aujourd’hui : mémoire et reconstruction
Aujourd’hui, Guernica est une ville reconstruite, paisible, mais toujours marquée par le souvenir. Le musée de la Paix (Gernikako Bakearen Museoa) retrace l’histoire du bombardement, la guerre civile et les luttes pour la paix. Le vieux chêne de Guernica, ou plutôt ses descendants, se dresse toujours fièrement, rappelant que la mémoire basque, malgré les bombes, n’a pas été éradiquée.
Des commémorations annuelles rassemblent habitants, autorités, anciens combattants et familles de victimes. Le cri de douleur et de révolte de Guernica continue de résonner à travers l’histoire, comme un appel à la paix, à la dignité humaine et au respect des peuples.